21 juillet - jour_35 - Santiago de Compostela - 43 km

Dernier étape, derniers cachets, dernière côte, finalement la plus forte de tout le trajet: 20%!!, heureusement sur 50 mètres seulement...
Et puis enfin la borne historique d'entrée à Santiago:

Mais il reste encore 10 km à parcourir. La plaque d'entrée en ville est plus ... moderne!


Encore environ 3 km, dans la ville moderne (et pas très belle), puis dans les ruelles du centre historique et cela y est, enfin, la Praza do Obradoiro!



 Impossible de décrire l'émotion que je ressens, je n'essaierai donc pas.

 Il reste plusieurs étapes "obligées": le parcours des gestes traditionnels dans la cathédrale(pas de chance nous ne pouvons en faire que l’accolade de la statue du Saint et la station devant sa sépulture, car une partie de l'édifice est en restauration ; ensuite encore faire la file pour obtenir la compostela, certificat (pas de chance, Rudyard est intraduisible en latin...).

Voilà, il est des aventures qui sont difficiles à terminer et pourtant, il faut bien en rester là...

20 juillet - jour_34 - Arzúa - 74 km



Voici le magnifique paysage que je pouvais admirer hier soir, et le même, ce matin au lever (sorry, la photo est à nouveau ratée, mais je pense que c'est dû à un problème technique de l'appareil)...




Nous approchons du but, j'ai raté la borne historique des 100 km, ou bien elle a été enlevée quand les nouvelles bornes ont été placées (elle se trouvait évidemment a un autre endroit que l'actuelle, plus précise). Je l'avais repérée sur Google Maps, mais la photo datait de quelques années. Voici donc la borne qui indique la distance que les pèlerins pédestres doivent parcourir pour obtenir la "Compostela" (c'est 200 km pour les cyclistes - et les cavaliers, au cas où Olivia souhaiterait se lancer). Le Chemin devient vraiment encombré et je dois souvent slalomer entre les groupes. Aux "authentiques" pèlerins se mêlent à présent une quantité de "promeneurs" avec un sac à dos léger ou même sans sac. Cela piaille et bien entendu certains sont pendus à leur smartphone. Comme lu dans le topoguide, on peut se sentir un peu dépossédé de son Chemin. Mais je pense encore toujours que chacun fait son Camino comme il l'entend, et peut-être que ces gens que je dépasse pensent que c'est moi le "touriste", j'ai d'ailleurs été doublé plusieurs fois par des malotrus en vtt qui foncent, sans le moindre bagage, en effrayant les marcheurs. Après tout, à cette distance, pour certains, se faire un Camino peut être un but de sortie sportive.



A présent, le Camino est partout, sur les grilles en fer forgé des parcs, les poubelles publiques et même sur des fromages! Chaque village a sa statue de pèlerin, chaque auberge, restaurant ou échoppe a son cachet, le fameux "sello" indispensable...


Mon fromage, tel que je l'ai acheté ce midi (miam!), et après un après-midi passé sur mon porte-bagages...







Je n'avais pas pensé à dégainer quand je me suis retrouvé au milieu des moutons, et ici, j'ai photographié les vaches en approche, mais je suis resté parfaitement immobile quand je me suis retrouvé au milieu du troupeau (une vache apeurée peut faire des mouvements très brusque et se/me blesser).

19 juillet - jour_33 - Sarria - 69 km

Ce matin je me suis levé avec un bouton de fièvre. Je mentionne ce détail juste pour montrer à quel point je suis "zen" en vue cette étape... En fait, le Cebreiro, c'est un peu comme les Pyrénées, il suffit de le prendre mètre par mètre. Comme pour les Pyrénées, les marcheurs ont la vie plus difficile que les cyclistes, je veux dire les cyclistes qui restent sur la route, car une jeune marcheuse rencontrée à l'étape ce soir a vu des cyclistes pousser leur vélo tout le long du sentier. Des puristes ou des inconscients?

Et voilà donc le troisième et dernier sommet "hors catégorie" franchi.  Ai-je signalé que nous étions en Castille et León depuis quelques jours? Oui, la fameuse Castille: "Au pays degue de Castill' il y avait tegued' un garçon qui vendait des glaces vanille et..."
Nous sommes maintenant en Galice (Galicia):
Un canto a Galicia / Tierra de mi padre
Un canto a Galicia / Que es mi tierra madre...
Il faut avouer que la Galice est plus romantique que Bobby Lapointe, mais revenons à nos moutons...


Pour la photo traditionnelle du sommet, Rossinante a souhaité que je la prenne de face, cette fois. Elle se trouve plus photogénique de ce côté (en fait, c'est parce que je lui accroché  la coquille qui montre que nous sommes pèlerins et elle en est toute fière)


18 juillet - jour_32 - Vega del Valcarce - 18 km

Jour de transition, à considérer comme un demi-jour de repos avant la dernière des trois ascensions hors catégorie. Pour la première fois je rencontre de l'antipathie indifférente (ou vice-versa), de la part d'un administratif officiel. A Villafranca, ce matin, comme je constate que le bureau de tourisme est fermé, je me rends à la mairie, comme d'habitude dans ce cas. Sans m'écouter, le gars me renvoie au bureau en question:
"- Mais il est fermé, ce bureau!
- Ha, il est fermé?
- Oui, nous sommes lundi et il est donc fermé. Comment puis-je obtenir le cachet?
- Je n'en sais rien, moi je travaille à la mairie et je n'ai pas de cachet, point (final!)."

J'ai tourné un peu en rond et j'ai fini par aller à la Guardia Civil ou tout s'est arrangé.



Certains ne perdent pas le nord! Comme il n'y a pas de ligne de bus dans le coin, celui-là propose aux pèlerins fatigués ou faibles de les emmener à cheval jusqu'au col!

17 juillet - jour_31 - Villafranca del Bierzo - 61 km

Une journée importante (tout est relatif bien sûr!). Étape de montagne hors-catégorie, comme les Pyrénées.Nous passons la Croix de Fer à 1.530 m d'altitude (le point le plus élevé de notre Chemin). Sept kilomètres sans un mètre de plat, même faux, mais au sommet, le sentiment d'un "passage". Et puis, le spectacle du paysage, le panorama immense. J'admire la pierre déposée par un autrichien: il devait avoir un lourd passé, celui-là! Comme j'ai oublié d'emporter un pierre d'Eghezée, j'en trouve une qui ressemble, je lui accorde la nationalité belge en procédure de snelrecht, je la charge de tout mon passé et je la dépose au pied de la croix, et le tour est joué.

Il est remarquable de voir qu'il y a en permanence des pèlerins à cet endroit, et qu'il n'y a pas une buvette, un magasin de souvenirs ou rien qui ressemble à une exploitation commerciale. Seule une ambulance de la croix rouge, dédiée aux pèlerins (!), y fait une halte.

La suite de la journée est essentiellement un retour vers la vallée. Nous avons donc fait 800 - 1500 - 600, ça secoue. A la fin de la journée, le gps indique 46°, ce n'est pas la latitude de l'endroit, c'est sa température!

16 juillet - jour_30 - Rabanal del Camino - 77 km




León, visite obligatoire de la cathédrale Sta Maria, bien sûr. La ville est plus petite que Burgos et nettement plus "sympathique"... Dans les faubourg, je vois ce clocher-mur ... et les cigognes...






Sur la place devant la cathédrale, un couple de jeunes asiatiques (Corée, Japon?) demande s'ils peuvent me prendre en photo avec eux. Plus tard une dame du même coin me demande si je fais le pèlerinage, et d'où je viens. J'ai dû un peu lui rafraîchir la mémoire sur la situation de notre pays (non, ce n'est pas une ville de France...) Elle a paru très impressionnée. Je la rencontre à nouveau dans un autre coin de la ville, et là elle demande à me prendre en photo. Je me demande si je n'ouvrirais pas un fan-club en Asie!


Aujourd'hui, j'ai passé le cap des 2.000 km. A Villadangos del Paramo on indique qu'il reste encore à peu près 300km jusque Santiago (nombre approximatif qui monte ou descend en fonction des villages traversés...). La distance théorique calculée avant le périple était de 2.100km. En pratique je fais environ 10% de trajet "complémentaires" (vers camping, pour chercher un bureau de tourisme, pour revenir sur mes pas en cas d'erreur de parcours, ...). Le total réel s'élèvera donc bien à +/- 2.300km.
Au passage, il est à remarquer que je possède toujours mon sac à dos...


15 juillet - jour_29 - León - 96 km

Au moment où j'écris ces lignes j'apprends par la télévision espagnole qu'une nouvelle attaque terroriste a été perpétrée en France. Il devient soudain dérisoire d'écrire qu'il faisait encore plus froid ce matin au lever du soleil, ou toute autre petite nouvelle de mon périple.

Je me limiterai donc à signaler une étape sans relief, nous sommes sur un plateau à environ 700 m. J'arrive ce soir à León ou plutôt dans les faubourgs, puisque c'est là que se situe le camping du jour. Je suppose que les splendeurs historiques de la ville que je visiterai donc demain matin me permettront de prendre du recul par rapport aux événements.

14 juillet - jour 28 - Carrión de los Condes - 92 km

J'ai encore du progrès à faire en espagnol, compréhension et expression:
- "Je voudrais les calamares (je montre le plat sur la carte)"
- "Il n'y a plus de calamares"
- "Je prendrai la brochette de gambas alors (je montre le plat sur la carte)"
Moins de 5 minutes plus tard (cela va toujours très vite, par exemple ce soir on vient de m'apporter le plat principal alors que je suis encore occupé à manger l'entrée), il m'apporte une copieuse assiette de... calmars frits. Et deux fourchettes. Soit, c'est qu'il y avait quand même du calmar finalement. Ils sont d'ailleurs excellents.
Pendant que je déguste mes calamares, le serveur revient m'apporter une assiette avec 3 tranches de jambon chaud et deux œufs sur plat:
- "Il doit y avoir erreur, je n'ai pas demandé cela, ce doit être pour quelqu'un d'autre."
- "Si si, c'est bien pour vous, vous m'avez demandé une assiette de calmars et le filet de porc!"
Je me suis donc retrouvé avec deux assiettes et deux fourchettes (une pour chaque main?). Il va de soi que j'ai à peine touché à ce plat (les œufs accompagnent d'office presque tous les plats, je sature...)

Il faisait frisquet ce matin au camping à Burgos: 6°C, avec toujours ce vent glacial. D'habitude, par cette météo, je me trouve un prétexte pour ne pas sortir le vélo, ici, il va bien falloir y aller! Je rajoute donc un maximum de couches d'épaisseurs et nous voilà partis. Sur le Chemin, je constate très rapidement que ce vent vient en fait de l'est et nous porte donc littéralement vers notre destination. Ça roule bien, sans trop d'effort. Qu'il est agréable de voir les éoliennes tourner dans le "bon" sens! Même Rossinante a compris et ne fait aucune remarque hostile.


13 juillet - jour 27 - Burgos - 47 km

Pour la 1ère fois je pars à 9 heures! Les pèlerins marcheurs sont, pour la plupart, déjà partis, donc les pèlerins cyclistes sont des paresseux! Il fait frisquet: 15°C et le ciel est couvert. Je mets ma petite laine (les pèlerins cyclistes sont aussi des douillets...). Après 18 km de montée constante, nous arrivons au col de la Pedraja, 1ère catégorie: 1150 m, nous sommes plus haut qu'au col d'Ibañeta dans les Pyrénées. La pente était moins forte, mais quand même, non? Toute la montée s'est effectuée sur la nationale, qui n'est plus du tout déserte! des dizaines de semi-remorques nous ont doublé: "waaaaayong, waaaaayong,!" Pas très top, mais finalement nous sommes arrivés.C'est Rossinante qui est fière. Elle tient absolument à ce que je la photographie, OK allez bon, voilà! Un petit rayon de soleil nous salue même. Ensuite, c'est parti pour la descente, d'abord par une belle piste dans les bois, ensuite sur une petite route de campagne au milieu des champs de blé. Pur bonheur, le silence, les senteurs, la route qui se déroule doucement: oubliés les camions, la foule de Pamplune, une heure de plaisir absolu. C'est ce genre de moment qui restera gravé, j'espère...

Nous arrivons à Burgos vers midi, ce qui permettra de visiter la ville et de repartir demain matin, et donc de regagner 1/2 jour. On mange un petit bout (j'ai l'impression de manger en permanence!) et hop direction la cathédrale (oui, encore...!). Une visite à couper le souffle (3,5 eur quand même, et encore, c'est moitié moins cher pour les peregrinos). J'y suis resté une heure, mais j'aurais pu y passer la journée. Ensuite un petit tour en ville car les bâtiments historiques sont légion. Visite un peu gâchée, par un vent glacial (enfin... pour moi) .

Au camping, je tombe sur les français de Chambéry rencontrés à Puente la Reina! Quand je pense qu'ils viennent de se faire toute la montée du col avec 4 vélos, je me sens soudain très quelconque. J'imagine ces deux petits bouts sur leur petit vélo, avec les camions, il faut le faire quand même...


12 juillet - jour_26 - Belorado - 73 km

Nous traversons Logroño en passant voir la cathédrale (hé oui...) et nous voilà reparti sur le chemin. Ce matin, notre route suit la piste gravillonnée des marcheurs. C'est un peu dur pour Rossinante, ses genoux souffrent et j'entends parfois des claquements un peu inquiétant, mais je fais comme si je n'entendais rien, en représailles de sa bouderie d'hier soir. Elle ne dit rien, elle est un peu penaude.

En quittant Logroño nous quittons la Navarre et entrons dans la Rioja (région vinicole) et les indications routières bilingues disparaissent, mais un logo jacquaire stylisé apparaît, plus moderne, dynamique.  Plus loin, il disparaîtra et le style "officiel" reviendra...Dommage, moi j'aimais bien.




Le temps est couvert et un vent fort souffle ... de face bien sûr! J'ai même un peu froid: mine de rien, nous sommes de nouveau sur des hauts plateaux, à 800 m d'altitude à la fin de la journée (Logroño était à env 400 m). Nous arrêtons finalement à Belorado. Pas de camping dans le voisinage, je suis tenté par une nuit en camping sauvage car il y des champs de blé à perte de vue et le soleil fait de timides apparitions, mais les batteries des divers appareils sont fort peu chargées. Allez, on se paie un hôtel, Rossinante dormira à l'abri et moi je vais prendre une bonne douche et manger à une vraie table, un vrai repas.


11 juillet - jour_25 - Logroño - 71 km

Le matin j'ai donc pris le bus pour Pamplune, où ma carte se trouvait bien au shop. Affaire close donc. Il est assez frappant de constater comme de petits incidents prennent une tout autre proportion à des centaines de km de chez soi... En attendant l'ouverture du magasin, je m'amuse à regarder le feu pour piétons. En avons-nous de tels chez nous?

Je quitte enfin Puente vers 15h. A Estella, 1ère surprise: la fontaine à vin est à sec car je passe le soir et le budget journalier de 100 litres est épuisé.

A Los Arcos, le camping indiqué par le topoguide n'existe pas, ou plutôt, il se trouve à 13 km, en dehors du chemin! Alors, plutôt que de faire inutilement 26 km, je décide de pousser quand même jusque Logroño (40 km) où se trouve le prochain camping (camper est moins évident en Espagne). Au moins ce seront des km utiles. Evidemment, Rossinante me fait une grosse colère: je lui fait faire des heures supplémentaires non prévues, elle va se plaindre à qui de droit, etc, etc. Je laisse dire et je pousse sur les pédales, mais elle n'arrête pas de bouder jusque Logroño où, c'est vrai, nous arrivons fort tard. Heureusement le camping est du bon côté de la ville, mais je monte quand même la tente dans la pénombre...

10 juillet - jour_24 - Puente la Reina - 0 km (repos forcé)

Je suis donc arrivé hier soir à l'étape,  un refuge de pèlerins où l'on peut aussi planter sa tente, plutôt qu'un vrai camping. Pour s'inscrire, il faut comme d'habitude présenter sa carte d'identité, et là je me rends compte que je ne l'ai plus. A Pamplune, j'ai acheté une carte sim espagnole et j'ai dû, là aussi, donner ma c.i. (c'est fou le nombre de fois qu'il faut la sortir!). Soit la vendeuse ne me l'a pas rendue, soit je l'ai mise en poche au lieu de la remettre dans son étui et perdue plus tard. Les formalités et formulaires à remplir ont duré si longtemps que, en sachant la foule qui déambulait devant le vélo, je devenais inquiet pour Rossinante et son chargement (c'est le plus gros souci du voyageur solitaire, je crois). Saint-Jacques en a-t-il eu un peu assez de mes distractions? Peut-être, mais en tout  cas, les gens au refuge ont vraiment cherché à m'aider. Nous avons téléphoné au magasin mais la vendeuse ne travaille que le matin. Sa collègue n'a cependant rien trouvé. Pas de chance, car c'est dimanche aujourd'hui. Que faire? Je décide de retourner à Pamplune lundi matin pour récupérer ma carte ou déclarer la perte à la police. Là encore les gestionnaire du refuge m'aident : il y a un autobus qui relie Puente la Reina à la ville. Comme j'ai un fichier scan de ma carte sur ma clé usb, ils me laissent utiliser leur photocopieuse pour l'imprimer et ensemble nous voyons les horaires des bus. En tout état de cause, je devrais à nouveau être sur le Camino en début d'après-midi. Ce matin, en me rendant au village, j'ai découvert que le camping prévu existe bien juste à côté du refuge et qu'en fait, je me suis trompé en arrivant. Merci St-Jacques, j'ai compris la leçon (j'espère!). En soi, la perte de la carte n'est pas un gros problème (en plus je devais la changer en novembre prochain), mais il est clair que j'ai entamé ma réserve de jours.
Veremos bien! Mañana es otro dia...




A Puente la Reina, le tragique destin d'une paire de godasses usées d'un pèlerin marcheur... 










Et puis rencontré un Français qui fait le Chemin à vélo avec sa famille : Monsieur, Madame et 3 enfants dont deux ont leur vélo et le troisième est tracté par papa! Incroyable.


9 juillet - jour_23 - Puente la Reina - 53 km

Après une nuit, appelons-la festive (la dernière fois que j'ai regardé l'heure, il était passé 3 heures), je quitte ce camping de noceurs et après quelques détours j'arrive enfin au centre historique de Pamplune. En entrant dans la cité par le pont-levis je me dis qu'il est remarquable de constater que des objets et des bâtiments destinés à faire la guerre ou la cuisine prennent un statut d'objet d'art ou de patrimoine à protéger dès qu'ils ont une centaine d'années (et cela ne fait que se renforcer avec les siècles? bien sûr). En ce sens, l'urinoir-fontaine du Duchamp, qui a tant choqué, était peut-être simplement un peu en avance sur son temps puisqu'un simple pot de chambre de nos grands-parents prend aujourd'hui de la valeur.

Mais, trêve de philosophie de bazar, quand j'entre donc dans la vieille ville, je comprends qu'en fait je suis arrivé à Pamplune en pleine fête. Il y a du blanc et rouge partout, les gens, en blanc immaculé, avec foulard et ceinture rouge, les drapeaux, les décorations florales, tout est blanc et rouge. il y a du monde partout, des milliers de gens, une foule compacte (que ne montrent pas les photos prises car elles datent de juste avant que je ne sois absorbé par le flot. Evidemment, la maison de tourisme se trouve juste au centre de la vieille ville et donc de cette masse en liesse. Là, le préposé m'explique que c'est la San Fermin, "la plus grande fête au monde", en moi-même, je souris: il ne doit pas connaître Binche, ce gars! Je comprendrai mon erreur plus tard, quand j'apprendrai qu'il s'agit de la fameuse semaine de folie où, entre autres, les toros sont lâchés dans les rues. Le jour de la fête même est le 6 ou le 7, mais ce samedi est bien sûr l'occasion de se lâcher. Le mystère du camping "fiesta" s'éclaircit.

Finalement, après cachet et emplettes je parviens à m'extraire de ce flamboiement, et, le temps demanger à la sortie de la ville, il est déjà passé 14 heures. La route est calme et peu vallonnée jusqu'au col du Pardon, mais il fait chaud. Les températures me rappelle mon séjour arabe (44° sur mon vélo). Au sommet (770 m quand même), c'est l'apaisement enfin. Un paysage à couper le souffle, un silence reposant. Mais la réalité reprend ses droits, il faut arriver au moins à Puente la Reina si je ne veux pas perdre la journée. En route, ma Rossinante, puisque même les marques au sol reconnaissent notre existence de pèlerins cyclistes... et de "bicicleta"!

8 juillet - jour_22 - Pamplona- 85 km (dont 8...)

Ce matin St-Jacques s'est incarné dans une jolie jeune femme basque, celle qui a trouvé mon sac à dos dans la rigole de la rue principale de SJPDP et qui cherchait dans les commerces avoisinants si je n'y étais venu, afin de me le rendre! J'avais déjà fait env. 4 km quand je me suis souvenu que je m'étais arrêté pour enlever une couche... Oui, je suis incorrigible. Dès que possible j'essaierai de trouver un gadget qui sonne quand on s'en éloigne de quelques mètres...

Après ce faux départ, donc, me voilà en route pour cette étape redoutée. Après la journée de repos caniculaire, le ciel est aujourd'hui gris et la température très agréable. Je commence à penser que St-Jacques m'a vraiment à la bonne. C'est au village frontière d'Arnéguy, et plus encore à Valcarlos que les choses sérieuses commencent. La pente n'est pas trop élevée, mais il n'y jamais de répit: cela grimpe plus ou moins fort, mais cela grimpe tout le temps. A l'altitude 850 je commence franchement à y croire. En fait, c'est moins dur que certaines étapes "casse-pattes" de Champagne-Ardennes ou du Béarn car on peut prendre un rythme ("andante", voire "lento") et s'y tenir. Et puis on entre dans les nuages, purée de pois, et tout-à-coup, la plaque indiquant le col. Quand j'y arrive, je suis tout seul, pas un chat. Me serais-je trompé d'adresse? "Non, j'rigooole!". Ambiance très spéciale que cette chapelle dans le brouillard où l'on ne voit pas à 50m. Puis arrive une dame (en 4x4) qui se met à se photographier avec son smartphone et une canne à "selfie". Elle se prend au moins 10 fois le portrait, puis disparaît...

Puis voilà enfin un couple de pèlerins pédestres. Des Suisses. Je les applaudis car les marcheurs suivent la voie réelle, impraticable à vélo (en vtt sans charge?) et ce  chemin-là passe par le col Lepoeder à 1.400 mètres. Ils me racontent qu'ils étaient là-bas au-dessus des nuages. J'oublie des prendre en photo, mais je pense à photographier la première flèche jaune, ubiquitaire sur le Chemin en Espagne...


Roncesvales, oui, Roncevaux, celui de Roland et de Charlemagne, est le premier village dans la descente et une étape majeure pour les pèlerins (pédestres) à cause du refuge immense, mais je ne m'attarde pas car je me sens tout petit parmi tous ces gens qui viennent de se taper 25 km d'ascension. Je prends mon cachet et je m'éclipse car la route est encore longue jusqu'à Pamplune.

Pamplune, où je finis par trouver le camping. J'ai bien cru arriver le jour d'un festival rock: un 1/4 d'heure d'attente avant de pouvoir m'inscrire, une musique tonitruante, des gens partout, qui crient et boivent de l'alcool ; on me met un petit bracelet bleu (j'en vois qui en ont un vert), pour le bar, il faut aller chercher des tickets. Ce coup-ci, je me suis vraiment trompé d'adresse! "Auriez-vous un emplacement silencieux? Oui, bien sûr, on va vous conduire..." Et je me retrouve à suivre une petite voiturette électrique dans les allées d'un gigantesque camp où les tentes et les camping-cars se touchent presque... et puis, la notion de silence est, comme on le sait, très relative. Buenas noches!